Hier, il faisait si beau, que z'ai décidé de m'en aller promener.

- Ze vais faire un tour, ai-ze dit à celui qui dit que ze ne suis que son avataresse.

- Vous en prenez bien à vos aises.

- Mazette, ze n'ai rien à faire et ze m'ennuie très fermement. Si cela continue, ze vais devenir neurasthénique.

- Si vous le souhaitez, ze puis vous trouver quelque occupation.

- Ze vous remercie de votre sollicitude, mais ze pense que ze dois çanzer une tartinette d'atmosphère.

Comme il était trop occupé, il n'a pas çerçé à me convaincre de demeurer dans son bureau.

Ze suis donc partie en çantonnant, comme les Parisiennes - que z'ai par ailleurs bien connue à la TSF - "Il fait trop beau pour travailler! Il fait trop beau pour rester enfermé!"

Sur les boulevards, z'ai fait du lèçe-vitrines les yeux ébaubis.

Ze suis passée devant l'éçoppe d'un bizoutier.

Le tenancier était devant la porte, fumant une cigarette mentholée.

- Vous me semblez avoir du goût, ma-t-il dit. Entrez donc...

- Ze ne pense pas que ce soit une bonne idée, lui ai-ze dit.

- Cela ne coûte rien de regarder. Z'ai de superbes colliers de perles qui vous iraient à merveille et qui me semblent avoir été créés pour vous.

Z'ai eu beau tenter de résister, de me faire violence, il a fallu que ze cède à la tentation qui était décidément trop forte. 

Il m'a montré des parures aussi belles les unes que les autres et scintillantes de mille feux tentateurs.

- Essayez en une. Ze sens qu'elles vous plaisent....

- Fouçtra, tentée ze suis, comme dirait l'Autre.

- Mettez en une autour de votre gracile cou, cela ne coûte rien.

Et dereçef z'ai cédé.

- Ze ne verrais pas cette parure sur une autre que vous! m'a dit le flatteur.

Cela tournait à l'Affaire du collier de la Reine....

Cette pensée subite m'a fait revenir les pattes sur terre!

- Ze n'ai pas les moyens....

- Ze suis prêt à vous faire un rabais.

- Un crédit?

- Ze ne suis pas le bonhomme vert de Cetelem!

- Et les perles, vous les vendez à l'unité? Ze pourrais sonzer à en açeter deux ou trois... C'est du commerce équitable, non?

- Mais où vous croyez vous? Vous n'êtes pas çez ma tante!

- Parce que votre tante est aussi bizoutière?

- Bon! Cela suffit. Passez donc votre çemin, impécunieuse.

- Ze n'ai pas l'honneur de vous saluer Mossieu!

Et ze suis sortie drapée dans ma dignité.